L’OEIL s’est rendu sur le terrain les 9 et 10 juillet 2013 accompagné d'un bureau d’études suite à la découverte d'organismes marins retrouvés morts dans deux baies du Grand Sud.
À la suite des fortes précipitations enregistrées sur le territoire début juillet 2013, l’OEIL avait été informé de la présence de nombreux organismes marins morts dans le Grand Sud. L’équipe de l’OEIL s’était alors rendue sur le terrain les 9 et 10 juillet 2013 pour estimer l’étendue de la perturbation une semaine après les précipitations et déterminer s’il s’agissait ou non d’un phénomène naturel. L'Observatoire est ensuite retourné sur le terrain pour observer la récupération des baies 3 mois après les fortes précipitations et effectuer une surveillance environnementale à plus long terme. |
Des organismes marins retrouvés morts le 5 juillet 2013
Poissons, holothuries, poulpes, crabes, etc. Des usagers du lagon ont observé le 5 juillet 2013 de nombreux organismes marins morts au niveau de deux baies situées dans le Grand Sud : la baie Kwë étant une zone sous l’influence des apports terrigènes en provenance de la mine de Vale Nouvelle-Calédonie, et la baie de Port Boisé, hors d’influence directe de la mine.
Vale Nouvelle-Calédonie et le Comité Consultatif Coutumier Environnemental ont envoyé des photos à l’OEIL. Des gardes nature de la province Sud se sont aussi rendus sur les lieux le 8 juillet 2013 et ont fait état d’une très forte turbidité des eaux marines dans ces baies.
Mission d'observation des 9 et 10 juillet 2013
ANALYSES PHYSICO-CHIMIQUES
L’OEIL et le bureau d’études EMR ont mesuré les paramètres physico-chimiques de l’eau (pH, salinité, turbidité, conductivité et température) au niveau des deux baies grâce à une multisonde. L’eau s’est révélée plus turbide (troublée par les particules de terre) en baie Kwë qu’en baie de Port Boisé et une couche d'eau douce d'une épaisseur de l’ordre de 2 mètres a été observée en surface sur les deux sites.
OBSERVATIONS SOUS-MARINES
Sous l'eau, le substrat (coraux, éponges, algues) était recouvert d'un film de terre. Les coraux situés dans moins de trois mètres d’eau avaient blanchi. Des organismes peu mobiles ont été retrouvés morts (oursin plat, pinne, etc).
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Ce même corail massif (Porites) a été pris en photo en baie Kwë, avant (à gauche) et après (à droite) avoir retiré les particules terrigènes. À droite, on observe un blanchissement des coraux. |
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Mission d'observation d'octobre 2013
Trois mois après, l'équipe est retournée sur place pour évaluer la récupération des deux baies.
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Mission 2014
Afin de maintenir une surveillance environnementale sur les communautés récifales de ces deux baies, l’Observatoire a mandaté le bureau d’étude SQUALE pour une nouvelle campagne de suivi en 2014.
Lire l'article de l'OEIL Magazine n°8
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Voir les résultats des suivis environnementaux baie Kwë et baie de Port Boisé
FAQ - Foire aux questions
Quelle est l’origine des mortalités d’organismes marins ?
Les fortes précipitations observées les 2 et 3 juillet 2013 ont eu des impacts sur les baies Kwë et de Port Boisé. Les mortalités d’organismes marins sont très probablement liées à la combinaison de plusieurs éléments :
1 - Dessalure
Les fortes précipitations ont entraîné une diminution importante de la concentration en sel dans les estuaires : on parle de dessalure des masses d’eau.
2 - Érosion et lessivage des sols
Le lessivage par les pluies des sols nus a eu pour conséquence l’apport de quantités certainement importantes de particules de terre dans les eaux des deux baies.
Il est également possible que le lessivage des sols ait entraîné plusieurs contaminants dans les eaux des rivières : des éléments métalliques tels que le nickel et le cobalt, naturellement présents dans le milieu, peuvent être massivement transportés dans les cours d’eau et dans les baies lors d’évènements pluvieux importants sur des sols érodés.
Ainsi, les effets cumulés de la faible salinité, de la forte concentration de particules en suspension et en contaminants, ont pu entraîner la mort de nombreux organismes marins situés dans de faibles profondeurs (0-2 mètres).
La vie aquatique est en effet sensible à de telles modifications de son environnement : les organismes marins non adaptés à l’eau douce ne peuvent pas réguler correctement leur concentration en sel par rapport au milieu dans lequel ils se trouvent. Une diminution de la salinité provoque alors des troubles physiologiques qui peuvent aller jusqu’à la mort. Les particules de terre, elles, sont susceptibles d'obstruer les branchies des organismes marins (invertébrés, poissons), d’étouffer les coraux, etc. Enfin, les éléments métalliques peuvent, à forte concentration, provoquer des troubles physiologiques sur les organismes marins.
Sur quelle surface s’étend la couche d’eau dessalée ?
La présence de colonies coralliennes blanchies jusqu’à une profondeur limitée à 2 mètres approximativement, montre très probablement qu’une couche d’eau douce superficielle de l’ordre de 2 mètres d’épaisseur, s’est répandue sur la quasi-totalité de la surface de chaque baie.
Pourquoi les poissons n’ont-ils pas fui les baies impactées ?
La présence parmi les organismes morts, de poissons récifaux particulièrement mobiles laisse penser que les arrivées massives d’eau douce et de sédiments ont été rapides et ont eu lieu la nuit. En effet, ces poissons sont connus pour se réfugier la nuit dans les interstices des récifs pour dormir. Ainsi, la survenue soudaine de ces inondations, n’a pas permis aux poissons de fuir.
L’activité industrielle et minière de Vale Nouvelle-Calédonie n’est-elle pas responsable des mortalités d’organismes marins ?Les perturbations observées sont survenues dans deux baies différentes : la baie Kwë, sous l’influence du projet de Vale Nouvelle-Calédonie et la baie de Port Boisé, hors d’influence directe de la mine. Cela semble confirmer l’origine naturelle des impacts. Malgré une durée, une intensité et une étendue de l’impact plus importantes dans la baie Kwë que dans la baie de Port Boisé, il n’est pas possible de lier directement l’origine de ce dernier aux activités industrielles et minières du projet de Vale Nouvelle-Calédonie. Il est toutefois plausible que les surfaces érodées situées à proximité de la mine aient accentué l’apport de particules de terre dans la baie Kwë et la dégradation de l’habitat des organismes récifaux. L’événement pluvieux des 2 et 3 janvier 2013 était-il exceptionnel ?
Sur le site d’observation météorologique le plus proche de la baie Kwë, il a été enregistré 450 millimètres de pluie en 24 heures et 100 millimètres en 1 heure. Ce cumul est particulièrement élevé.
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Existe-t-il d’autres cas similaires dans le monde ?
Malgré le peu d’articles scientifiques concernant les effets de fortes précipitations sur les communautés récifo-lagonaires, certains apportent des éléments importants qui confirment les observations faites dans le cadre de l’étude en baie Kwë et de Port Boisé.
Pourquoi l’OEIL n’a-t-il pas fait d’analyse sur les poissons morts ?
L’OEIL s’est rendu sur le terrain le 9 juillet, soit 4 jours après avoir été informé de la découverte d’organismes marins morts et 7 jours après les fortes pluies. Au cours de cette mission terrain, de nombreuses perturbations ont été notées (coraux blanchis, oursins et huitres morts, eaux turbides, couche d’eau douce superficielle, film de terre sur les coraux, etc.) mais aucun poisson n’a été retrouvé mort. En outre, les analyses des éventuels poissons retrouvés morts au moment de cette mission n’auraient pas pu être concluantes. En effet, les tissus auraient été trop abîmés, 7 jours après les perturbations, pour déterminer l’origine des mortalités.
Vale Nouvelle-Calédonie (via le bureau d’études AEL) mène actuellement une étude pour voir si les organismes retrouvés morts le 5 juillet contiennent des contaminants dans leurs tissus. Quelles suites à cette mission terrain ?
Le rapport complet de l’OEIL (rédigé par le bureau d’études EMR), a été soumis au Conseil Scientifique de l’OEIL qui a rendu un avis favorable. Les résultats détaillés ont été communiqués notamment auprès des habitants des tribus du Sud au cours de réunions publiques dans le Grand Sud.
Trois mois après les observations de juillet 2013, l'équipe est retournée sur place pour évaluer la récupération des deux baies. Cette mission a donné lieu à un second rapport.
Afin de maintenir une surveillance environnementale sur les communautés récifales de ces deux baies, l’Observatoire a mandaté le bureau d’étude SQUALE pour une nouvelle campagne de suivi en 2014. Voir le rapport 2014
Sources :
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